Sur nous nous avions:

• 1 paire de chaussure neige Decathlon (modele le plus chaud)
• 1 paire de chaussettes en soie
• 1 paire de chaussettes en laine (woolpower 200 pour moi, 400 pour Ariane)
• Pour Ariane, une paire de semelles epaisses achetees sur le marche d'Irkoutsk avec de la fourrure.
• 1 collant woolpower 400
• notre unique pantalon d'ete
• 1 surpantalon coupe pluie coupe vent respirant
• 1 tshirt woolpower manche longue 200
• Ariane avait sa polaire, moi non car j'avas trop chaud avec
• notre doudoune apex 100g/m2
• notre veste gore tex
• 1 paire de sous gants en soie
• 1 paire de gants en laine (bien epais)
• 1 paire de surmoufles coupe vent  le 2eme jour a cause du vent (indispensable)

Il faisait entre -15 et -20 degres (en gros), et nous etions parfaitement bien. Par contre jamais de grandes pauses, enfin pas plus de 15min.

En statique sous la tente, a cause du rechaud il faisait bon (-5 degres), nous avons donc seulement change de chausettes. J'ai mis mes 400, et ariane a mis une paire qu'elle a achete en Russie sur un marche et qui etait a peu pres aussi lourde que nos 400. Un peu limite sur les pieds, nous avons mis nos duvets dessus pour ne pas avoir froid.

Quand nous sommes sortis voir les etoiles, on ne devait pas etre loin des -30 degres et la on s'est caille les fesses! Il aurait fallut remettre par dessus nos grosses doudounes recemment achetes, mais on a eu la flemme de les sortir... . Par contre avec je pense que ca aurait ete niquel car il y a vraiment beaucoup de duvet dedans (mais ce sont 2 enclumes).

Nous sommes donc tres satisfait de notre equipement qui a parfaitement fonctionne. Pour descendre encore en temperature, on pourrait prendre un tshirt plus epais (800 ou 400), ou encore cumuler deux 200. En revanche, les vestes seraient a changer par de vrais manteaux d'expedition, garnis d'isolant, tres amples avec grosse capuche et qui descendent a mi-cuisse. Au niveau des pieds on etait limite je pense, mais ce n'etait pas une suprise. Pour une marche plus longue, de vrais chaussures sont quand meme recommandees, et les D4 sont trop souples pour de grandes marches. 

Allez, debout! J'emerge doucement apres ma nuit difficile, tres mal au cou, et il faut une force surhumaine pour se mettre assise! En passant, vu que la surface de la toile de tente est gelee, en me levant, j'envoie de la glace partout, chouette reveil!
J'aurais du prendre nos matelas en plus, on a eu froid dans le dos toute la nuit... Grrr! J'ai plutot bien dormi malgre le confinement, meme si parfois je sursautais lorsque la glace craquait vraiment fort!

Je m'habille car bon, une pause technique s'impose, de quoi gouter le froid matinal! Franchement, ca me fait du bien! Ensuite petite dej: 2 sachets de Kacha; un de trop pour moi... c'est bon mais ce n'est pas ma tasse de the; je mange car il faut.. mais dur dur de finir! Du the, quelques tranches de saucisson (un peu trop sale pour le matin!) et du fromage! Nous sommes prets pour affronter le froid.

Nous revient la "lourde" tache de preparer les sandwichs pour le midi. Leonid les gardera dans sa poche de manteau pour les garder au chaud, vu que tout gele! Meme le dentifrice et la creme... impossible donc de se laver les dents.. ou de se rehydrater la peau! Dur dur!

Il faut tout ranger, replier la tente, faire les pulkas... et nous arrivons a partir, avec une heure de retard.

C'est parti pour la deuxieme journee qui s'annonce longue car 30km a parcourir!

La neige est davantage gele donc j'avance plus vite. Rapidement, on commence a trouve de petites etendues glacees, sans neige; ca glisse!

Au debut c'est plutot rigolo, car la pulka part en vrille toute seule sur la glace tandis que nous marchons. Sauf que plus le temps passe, plus il y a de glace et plus elle part en vrille et a tendance a se retourner en arrivant sur la neige. Il faut tenir la corde a la main et donner une impulsion au dernier moment pour la remettre dans l'axe, parfois c'est sport.

Nous finissons par enfiler nos crampons, des sortes de ressorts sous le pied qui griffent la glace et nous pouvons avancer plus surement!
J'ai eu peur en voyant la tete des crampons, et j'ai eu raison puisque ca n'en etait pas! De pauvres ressorts vrilles et roule ma poule, c'etait mieux que rien mais l'accroche etait vraiment precaire.
Cependant, c'etait vraiment magnifique et l'on a vraiment eu l'impression de marcher sur l'eau. La glace etait zebree de fissures dans lesquelles neige et air ont ete emprisonnes, cela forme de magnifiques arabesques!

C'eut ete trop facile comme cela; le vent se mele a la partie et commence a bien souffler! C'est normal, nous sommes au milieu du lac! Il souffle de la droite vers la gauche et me desequilibre a de nombreuses reprise, quand je suis sur la glace! A un moment, je me dis que ca risque vraiment d'etre long tout ca! Pfiou!!!

Quasiment d'un coup le vent se leve a la moitie du lac, cela va completement changer la donne. Quand je dis "vent", je parle vraiment d'un gros courant d'air. Une surface lisse de plus de 600km de long, pas d'obstacles... Ca souffle! Les pulkas prennent le vent et se deportent en permanence sur notre gauche et se renversent tres facilement au moindre piege du terrain. Nous perdons pas mal de temps avant de reorganiser nos pulkas en chargeant plus le flanc gauche que le droit. On repart, mais on a perdu beaucoup de temps dans l'histoire... Pas trop d'idee de la temperature avec ce vent, mais tres tres froid... (plus froid que la veille a -15 degres)

Nous cassons la croute lorsque Leonid trouve une petite butte de neige qui nous permet d'etre un peu abrite du vent! Miam mais il faut faire vite! Pause pipi, pour le confort de Madame, ces messieurs disposent leurs deux pulkas pour faire barriere au vent.. c'est vrai que c'est pas mal!
Apres 3h de marche, la pause repas. On fait un pseudo mur dans la depression pour se proteger un peu, mais c'est derisoire compare a la force du vent. Nous mangeons sans rien dire, et de toute facon c'est impossible vut le rafut qui regne ici!

Il faut repartir... les etendues de glace se font de plus en plus immenses... ce n'est pas simple... surtout avec ma Pulka que je traine et qui sans cesse est emportee par le vent et qui essaie de m'emporter avec elle... j'ai l'impression de trainer mon toutou!!!

Je passe par diverses phases ou le metal joue beaucoup; j'apprends a me connaitre. Je trouve diverses manieres de tenir bon, en reprenant une chanson apprise a mes eleves "Rain go away" que je transforme en "Wind, wind, go away", en m'inventant une chanson "Tiens bon, le reve est a ta portee,...", en me mottivant avec des Go a chaque pas... surtout quand je viens de glisser...

Les muscles font serieusement bobo, surtout du cote droit car il faut sans cesse lutter contre le vent... mais comme je dis a Pol " Aller au bout de ses reves, ca a un prix!". Je crois que c'est ce que j'ai compris ici!

Le vent ne faiblit pas et il n'y a quasiment plus de neige maintenant. La pulka nous entraine dans le sens du vent alors que nous voulons aller dans la direction quasi opposee. C'est dur, nos crampons n'accrochent pas et pour 2 pas de faits dans la neige nous en faisons 3 ou 3.5 sur la glace. Que d'energie perdue!

Je marche seul en queue, Leonid est a 50m devant, Ariane 25m. Le peu de neige restant a la surface du lac file a une vitesse incroyable sur la glace, poussee par un ventilateur geant! Notre oeil s'adapte, nous cherchons le moindre petit recoin de neige ou la moindre faille dans la glace pour prendre appui. Parfois une rafale plus violente que les autres tire la pulka un peu trop fort et nous desequilibre. Le vent nous pousse alors comme des bouchons sur la glace sur plusieurs metres jusqu'a ce que les crampons reprennent appui. Il faut alors refaire tous les metres perdus a moitie couche sur la glace pour offrir moins de prise au vent. Nous progressons de biais, il est quasiment impossible de se tenir debout face au vent. Je suis heureux malgre tout d'etre la... 

On marche depuis midi maintenant, la fatigue est la. Les jambes, le bassin, les bras sont lourds. Nous sommes abrutis par le vent et le froid mord par toutes les ouvertures possibles. L'arrivee est bien visible, mais se rapproche si lentement!

A la fin, dur de savoir quand on arrivera,... Leonid me prend ma pulka car il se fait du souci pour moi. Pavel vient a notre rencontre sur la glace. Il prend nos bagages et nous demande si on veut continuer. Leonid pense que je vais arreter, mais je suis tetue, et comme je lui dit, tout est dans la tete!

Les 2 derniers heures se font au mental, tout le monde est sur les rotules. On serre tous les dents et on ne dit rien.

Je crois d'ailleurs que les 3 deniers kilometres ont ete les plus rapides de toute notre balade!!! Encore un peu de marche et nous y sommes Youpi!!!!

Il etait moins une, il fait quasiment nuit maintenant... Leonid est aussi dechire que nous, a un moment il a cru que l'on ne pourrait pas tenir cette marche forcee pendant 7 heures d'affiles, nous nous sommes arretes 20min sur toute la journee seulement...
Cela fait du bien d'etre arrive mais surtout, d'etre a l'abri de ce foutu vent! Je ne sais pas a combien il soufflait, mais le fait de ne pas pouvoir etre debout en dit long sur sa force... Nous avons seulement fait 30km, mais j'ai l'impression d'en avoir fait au moins 50... Fichus crampons! Pavel nous apprendra que d'autres sont en commande, ils ne pensaient pas que ca pourrait etre si dur avec ce vent. Tu m'etonnes....

Je suis super heureux de cette petite rando bien physique de 2 jours. On a un peu paye de ne pas avoir fait de rando tout le mois de janvier en France, mais ca ne nous a pas gache le plaisir. Notre 1ere grosse rando en condition tres froide nous a enchante, et nous avons hate de refaire quelque chose de similaire, en autonomie ca serait le top. Nous avons quelques balades hivernales a preparer en France a notre retour!

Ce 2eme jour sur le baikal coincidait exactement avec un anniversaire: cela fait pile 10 ans que nous sommes en couple (deja!). Hasard du calendrier, mais restropectivement on ne pouvait pas rever mieux...

Mon reveil sonne et je suis toute excitee a l'idee d'aller sur le Baikal! On se prend d'abord un petite dej dans la chambre avec du muesli puis on va manger les crepes de Galina, notre hote, avec de la delicieuse confiture maison. Comme ca, je suis sure de ne pas avoir faim et d'avoir des forces.

Il est temps de s'habiller en mode grand froid: chaussettes montantes en soie, collant woolpower 400, chaussettes bien chaudes, merinos 400 manches longues et polaire. Pour dehors, doudoune et veste imper respi!

A 10h15, Pavel, le responsable de Baikal Nature et Leonid, notre guide, sonnent! En route! Nous montons dans la voiture et c'est parti pour 4 heures de route! C'est long! heureusement, je papotte avec Leonid en Anglais, les paysages sont tres beaux et on fait regulierement des pauses.

Nous voila arrives a Tankhoi, petit village Bouriate. Nous nous arretons pres des voies de chemin de fer. Il est temps de charger nos pulkas. Je laisse a Pavel mon guitalele, ma partie de la tente, mon matelas et mes chaussures de rando d'ete. Mon sac est plus leger et je peux prendre la moitie de la nourriture pour notre voyage. Je regarde comment Pavel charge ma pulka et j'en prends note pour le lendemain!
Je laisse egalement ma partie de tente, mes chaussures d'ete. En voyant la tronche des matelas fournis par l'agence, j'hesite a prendre le mien en plus. Je le laisse finalement pour m'alleger encore un peu plus, surtout que ces pulkas se tirent avec une ceinture et non un harnais, donc pas tres confortable si trop chargee.

Il faut y aller! Nous traversons la voie de chemin de fer (ca fait drole) en portant nos pulkas (ca fait deja mal aux bras) puis on s'arrete de l'autre cote et on marche dans de la neige jusqu'au lac.
On s'etait renseigne pour savoir s'il nous fallait des guetres, on nous a dit "non, il n' y a pas de neige sur le baikal". Tu parles, on marche dans la poudreuse jusqu'au genou, on est bon pour changer les chaussettes apres 200m. Sur la partie ouest ou nous sommes il y a quand meme pas mal de neige, jusque mi mollet par endroits une fois sur le lac.

Il est temps de changer de chaussettes pour avoir les pieds bien secs; comme ca, on est surs de ne pas avoir froid aux pieds! Moi qui a sans cesse les pieds froids, je peux vous dire que ca marche super bien!

ca y'est nous voila sur le lac; l'autre rive semble proche... il y a pourtant 40km a parcourir! Le soleil est au rendez-vous et c'est vraiment magique. Pas si simple que ca d'avancer car la couche de neige est plutot importante mais je me sens tres vite hyper bien! Je me sens libre, heureuse aussi d'etre seule avec moi-meme face a ce decor magnifique!
Le soleil est au rendez vous, il fait super beau (-15 degres environ), pas de vent, que demander de plus? C'est juste excellent de marcher ici!!!!

Au bout d'1 heure environ, nous trouvons une cabane de pecheur et nous nous y arretons pour manger a l'abri du vent! Ca sent le poisson! Mais peu importe! Nous mangeons nos sandwichs, nous buvons du the chaud et sucre et nous mettons de la mangue sechee dans nos poches pour la suite du chemin.

La vue sur Tankhoi:

4 heures de marche pour ce premier jour, 4 heures fantastiques, meme si parfois j'aurais aime avancer plus vite! 4 heures de pure liberte, de bonheur simple, a ecouter les bruits de Dame Nature, de la neige crisser sous nos pieds, du vent... on ne se sent pas seule! Et les bruits changeaient au fur et a mesure que la couche de neige diminuait.
Le paysage est grandiose, je suis super heureux de marcher sur ce lac. Le temps est passe si vite! Par contre nous sommes partis tard, trop tard, et le guide avait table sur une quantite de neige moindre, nous n'avons donc fait que 10km soit la moitie de ce qui etait prevu. On s'arrete, vraiment pas fatigues...

Nous devons nous arreter pour planter la tente avant le coucher du soleil. Nous defaisons nos pulkas, mettons la tente interieure puis fini le boulot pour Ariane (ah la la dur dur d'etre une femme!!!), ma tache et de preparer les tapis de sol dans la tente et de boire du the!

 Nous sommes encore frais! :

Je plante la tente avec Leonid, une minuscule 4 saisons, ca va etre serre a l'interieur! Il faut faire vite, la temperature chute tres vite et sera bientot sous les -20 degres. Pendant que Leonid pourrit la toile, je remplis une pulka de blocs de glaces que je decoupe avec un couteau pas MUL du tout, genre une lame de 25cm... Tres pratique pour casser la glace ou amputer un membre gele!

Une fois que les hommes ont fini de monter la tente et de couper de la glace, nous organisons le mini espace interieur pour que ca soit "jouable" et Leonid commence a faire bouillir de l'eau.

C'est l'heure de l'aperitif, Vodka/the avec saucisson et fromage! pas mal du tout! Puis on mange une soupe de nouilles avec des flocons de puree dedans et des sardines. J'avais un peu peur du resultat mais c'est tres bon et nourissant, surtout avec des olives noires. En dessert, du chocolat, des biscuits a la confiture et du the.

Pfiou, il est deja 22 heures! Il est temps de dormir. Derniere sortie technique dehors et j'en profite pour admirer le ciel etoile, je n'ai jamais vu autant d'etoiles dans le ciel, c'est juste magique, splendide, incroyable!
Il y a des choses qui sont impremables en photo, ce ciel la en fait parti. Je pense que c'est une des plus belles chose que j'ai pu voir dans ma vie, un ciel d'une purete absolu et des etoiles d'un eclat... a rester sans voix! Je reconnais seulement la petite ourse qui est a l'envers par rapport a chez nous, mais c'est pure magie. Meme notre guide nous avoue qu'il a rarement vu de ciel aussi beau! Peut etre le temps tres clair et la temperature tres froide y sont-ils pour quelques chose?

On installe notre dodo... pas beaucoup de place pour moi, je suis coincee entre les deux hommes, a peine de place pour mes 2 epaules, je dois me contorsionner... j'avoue que je n'ai pas beaucoup et pas tres bien dormi mais tant pis! J'ai aussi pu entendre la glace craquer; c'est impressionnant.
Pas la place d'etendre les jambes, trop serre! Je commence a m'endormir quand un coup de tonnerre me reveille. Le tonnerre? Juste les plaques de glace qui bougent sur le lac et qui explosent en laissant une onde de choc qui parcourt le lac... Il fait entre -25 et -30 dehors, je ne voudrais pour rien au monde etre ailleurs.

Un petit article pour remettre les pendules a l'heure en ce qui concerne l'enregistrement des etrangers. Au debut on avait mal compris le systeme, bien entretenu par les hotels et auberges qui se font de l'argent avec. On vous force un peu la main, "si si vous devez vous enregistrer de nouveau sinon vous allez avoir des problemes!". Peut etre que nous sommes pas doues et que c'est tres clair pour vous, mais sait-on jamais...

Vous devez vous enregisrer:

• a votre arrivee sur le territoire Russe, la 1ere nuit ou rapidement
  
• vous devez vous enregistrer de nouveau si et seulement si vous restez plus de 7 jours (ouvres, donc sans compter le week-end dedans!) dans la meme ville!

Voila, c'est tout! Donc en admettant que vous voyagez en transsiberien et que vous faites des arrets de moins de 7 jours a chaque fois, 1 seul enregistrement (le 1er) est necessaire. Par contre, vous devez garder vos billets de train sur vous comme preuve de deplacement.

De plus, les Russes nous ont bien dit que c'etait de la betise et que jamais aucun touriste n'etait controle, les flics ont autre chose a faire. Ce n'est pas une raison pour ne rien faire car il faut etre en regle, mais ce n'est pas une raison pour se faire plumer par les auberges! 

Enfin, nous y sommes! Pour moi, c'est deja la fete dans ma tete! Ce nom mythique repete tant de fois pendant la preparation a la limite d'un mantra me rempli de joie maintenant que je suis assis dedans!

Chaque km qui passe, c'est un km de reve d'accompli dans ma tete ! Le train avance lentement, j'ai le temps d'admirer les paysages somptueux qui defilent lentement sous mes yeux. Tout est neige et glace, le soleil joue avec l'ombre et la lumiere en faisant scintiller les flocons de neige qui volent au vent.
Parfois nous traversons des foret de bouleaux, de pins, ou encore des immenses plaines qui s'etendent a perte de vue... Je ne me lasse pas de les admirer! Un apercu rapide pourrait ammener le voyageur presse a dire 'bon ben quand t'en a vu une tu les a toutes vues hein...", mais la neige et le soleil declinent a l'infini les couleurs, les ombres et les formes qui s'offrent a moi. Je passe des heures le nez colle a la fenetre a regarde le vent balayer ces immenses espaces en transportant avec lui des mini tornades de flocons scintillants. Parfois (et meme plutot souvent en fait!) nous passons sur un pont et l'on peut apercevoir une riviere luttant pour sortir de sa prison de glace, mince filet bleute reflechissant le soleil et le ciel...

Mon oreille voyage aussi, le train possede ses bruits propres, et chaque troncon de rail en modifie la texture. Un pont, une courbe, un aigullage, un patinage....

En fermant les yeux je voyage encore! C'est la 1ere fois que j'ai un rapport au temps aussi particulier: 55 heures de voyage non stop... Soit on compte et on devient fou, soit on deconnecte le cerveau et on se cale sur son horloge a soi. J'ai faim, j'ai soif, je veux parler, je veux dormir... Et peu importe l'heure a l'exterieur, c'est un monde dont vous ne faites temporairement plus parti... Vous n'attendez plus l'arrivee, vous savez que ce n'est pas avant apres apres demain. Mon esprit s'est vraiment libere lui aussi, et j'ai pas mal voyage en restant immobile plusieurs heures durant a ne "rien faire"! Ecouter, regarder, rever, tout ca m'a pris tellement de temps que je me suis supris a dire "oh, il fait nuit!". C'est un bonheur qui n'a pas de prix...

En ce qui concerne l'odorat, on peut resumer ca par "ca cocotte severe!!!!" . Ca pue les pieds enfermes sans aeration pendant plusieurs jours, la transpiration, les relents de nouilles et de saucisson... Si les WC sont bien nettoyes et assez recents ca sent le produit chimique, et sinon je pense qu'on peut dire tout simplement que ca pue la merde! Et meme si c'est nettoye regulierement, l'odeur reste...

Nous traversons en majorite des zones desertiques, les villes et villages sont vraiment peu nombreux sur la ligne (vu sa longueur). Ce n'est pas forcement un mal du point de vue esthetique, car si les payages sont sublimes les zones habitees oscillent entre le "passable" et le tres moche. L'architecture et l'organisation est avant tout fonctionnelle, je ne compte plus les vieux hangars effondres et rouilles qui pourissent sur place. Les Russes vivent sur des decharges de bois et d'acier, sans que ca semble les deranger plus que ca. Peut etre ne voient-ils plus ces verrues qui enlaidissent leurs lieux de vie? Ca me laisse un sentiment d'un peuple qui vit dans l'urgence, la priorite etant de passer le prochain hiver. On ne va pas mettre la voiture a la casse alors qu'en la laissant pourrir dans le jardin on pourra la desosser tranquillement au fur et a mesure! Ce raisonnement se retrouve a l'echelle des villes qui semblent immenses mais dont seuls 20% semblent habites, et meme dans les chemins de fer russes: que de wagons rouilles et tordus par le froid abandonnes sur leur flanc le long des voies....

Je me demande quand meme comment se passe la vie dans ses zones si reculees, que peut-on faire dans un village ou meme la route principale est prise dans 2m de neige? Je vois neanmois des traces de motoneige, et bien plus de traces d'animaux!

Malheureusement aucune personne ne peut me repondre, car absolument personne ne parle anglais. C'est bien beau la 3eme classe, mais nous sommes presque les seuls a ne voyager qu'en 3eme classe parmi les voyageurs que nous avons rencontres. Les autres ont majoritairement pris la 2nde classe, ou l'on se rencontre entre voyageurs occidentaux. La destination n'y est pas pour rien non plus, notre train pour Tomsk ne transporte que des voyageurs qui feront 24h maximum dans le train (nous serons quasi les seuls a faire l'integralite du trajet). Du coup nous sommes avec des russes qui se fichent completement de notre presence, et qui se fichent bien d'ailleurs des autres voyageures russes. Ambiance chacun pour soi sur ce 1er troncon, heureusement par la suite ce sera completement different! Les gens sont plus sympas et plus curieux quand ils voyagent sur plusieurs jours!
Sur le 2eme troncon nous ferons la connaissance d'un couple de vieux Russes qui voulaient limite nous mettre hors du box pour etre tranquille(car il restait de la place ailleurs), et qui apres que nous leur ayons souhaite "bon appetit" nous a offert a manger! Ensuite petit bavardage pour savoir qui on est et d'ou on vient, ou va t-on et surtout, pourquoi?! Les Russes ont du mal a comprendre pourquoi 2 voyegeurs occidentaux (donc riches) se cognent volontairement 1 semaine de train en 3eme classe alors que nous pourrions rester au chaud chez nous en France... Au pire, prendre au moins la 1ere classe!
Le 3eme troncon sera mon prefere, avec notre voisin congolais en guise de traducteur, et un train bonde de Russes allant a Vladivostock. Pour le coup 2 francais dans le wagon ca fait un excellent sujet de conversation, on a pas arreter de papoter!
Le 4eme troncon pour venir a Oulan Oude fut un peu a part, "juste" 8h de train, pas de quoi de lier connaissance... Et pourtant ca aurait pu, le voisin de droite n'a pas arrete de de me devisager, a croire que j'avais un nez rouge sur la figure! 

Bientot se sera le transmongolien, en tout cas cette petite traversee de la Russie en train me laissera de merveilleux souvenirs!

Des que nous avons commence a marcher sur le Baikal, de nombreux mots me sont venus interieurement, comme pour resumer ce que je voyais, comme pour resumer mon cheminement interieur... je m'y suis sentie tellement bien, tellement libre,....

J'ai essaye de les associer pour vous faire partager ce "voyage" mais ce n'est qu'un avant gout; vous aurez plus de details prochainement!

Sur le lac Baikal,

Paysages a perte de vue,

Montagnes proches et lointaines a la fois,

Illusions qui guident mon avancee. 

La neige s'amoncelle et crisse sous mes pas. 

Dame Nature est ma compagne

Et la liberte s'offre a moi!

Nuit au beau milieu de cette imensite,

Glace bleutee que neige rend dentelle,

Pulkas et crampons griffent la glace

Tandis que le vent fouette mon visage; 

Chantonnant pour poursuivre ma route.

Enfin, la rive est proche;

Le reve est accompli.

Bania russe et bon repas,

Multitude d'etoiles dans le ciel,

Terminent cette excursion en beaute!

Petites pensees speciales a toi Mum et toi Nonno, qui m'avez sans nul doute insuffle cette envie de poesie!